Gris - Wed, Mar 19, 2025
comme j’ai écrit ce texte pour un devoir de philo, c’est probablement le mieux écrit, profitez, ca sera pas comme ca tout le temps
Il est généralement accepté que l’on associe les couleurs à des émotions, et qu’un jeu ou une œuvre d’art en général peut utiliser ces associations afin de manipuler les émotions. On pense par exemple à Evangelion où la douleur est symbolisée par le rouge (Asuka et EVA-02 en général et de nombreuses scènes de pilotage de Shinji) et la maternité par le violet (les cheveux de Misato, la couleur d’EVA-01). On peut aussi penser aux couleurs dans l’art abstrait ou aux filtres rouges dans les jeux vidéo lorsque l’on est sur le point de mourir.
En général, cela marche mieux lorsque l’association est déjà acquise : le rouge représentant la douleur est bien plus évident que le violet dans Evangelion.
Gris joue sur ces couleurs afin de représenter les émotions et de montrer leur complexité.
En effet, Gris est un jeu vidéo dans lequel on incarne Gris, une jeune fille qui évolue au travers de cinq étapes du deuil du modèle de Kübler-Ross. Chaque étape est représentée au travers du jeu par une couleur.
Blanc :
Déni. La première étape se fait sans couleurs, et représente le déni. C’est une étape pendant laquelle le cerveau n’accepte que ce qu’il peut supporter. Cela est montré par une absence totale de complexité, le monde est réduit à une simple ligne d’horizon noire sur un fond blanc. La scène se complexifie progressivement, symbolisant la prise de conscience. Des ruines apparaissent puis une nouvelle couleur, on passe à la prochaine étape.
Rouge :
Colère. Cette colère est tout d’abord étonnamment calme, des tons roses, une musique grave, mais lente, comme si la colère s’imposait et était subie. On escalade une montagne, symbolisant une action volontaire, et les tons pastel deviennent de plus en plus vifs. Puis, on entame la déscente, les rouge vifs deviennent foncés, les violoncelles sont remplacés par un piano nerveux. On ne contrôle plus la décente, on glisse, sans rien pouvoir faire, dans une colère sourde, tandis que la musique s’arrête. Plus rien ne bouge, des éoliennes sont à l’arrêt. Quand soudain le vent représentant notre colère se lève et le ciel redevenu blanc se remplit de sable rouge, l’orgue commence à jouer. Gris représente là une colère épisodique et incontrôlable qui nous empêche d’avancer. Puis tandis que la tempête fait rage, on trouve enfin une utilité à la colère, qui, une fois contrôlée, nous permet de détruire les obstacles et de s’ancrer sur sa position pour laisser passer la tempête.
Mais on découvre aussi que notre colère affecte les autres. En effet, on détruit des sortes d’araignées cailloux qui ont peur de nous.
Puis, on passe à l’étape suivante.
Vert :
Marchandage. Le choix du vert est étonnant, généralement associé à l’espoir. Cette étape serait une sorte d’espoir qu’à travers un pacte, les problèmes seront réglés.
Ce vert est agréable et contraste avec le rouge auquel on est habitué, et il est présent avec une représentation de la nature vivante. Là encore en contraste avec les roches de la phase précédente.
Cette phase est aussi représentée dans le gameplay, on essaye de communiquer avec un petit animal de la forêt en lui offrant des pommes, et il nous aide à avancer. Mais ce n’est pas pour autant que le rouge n’a pas disparu, Gris nous montre que passer à l’étape suivante n’est pas un changement d’émotion, mais un ajout. La colère reste présente, c’est parfois par la violence qu’on arrive à faire tomber des pommes pour notre ami et les parties de parcours les plus frustrantes se font sur des arbres rouges.
Au fur et à mesure que l’on sort de cette forêt, on réalise que cela n’a servi à rien et la colère revient. Encore plus violente qu’avant, elle ne s’arrête que dans les larmes et dans la destruction.
Bleu :
Dépression. Le bleu est comme souvent associé à la tristesse. Il enveloppe le monde en quelques secondes. Et, si c’est un bleu d’abord calme et réconfortant en comparaison avec la violence du rouge. Il devient sombre et opressant à mesure que l’on s’enfonce dans une mer de bleu. On est guidé de temps à autre par d’autres couleurs, qui n’ont pas disparu, mais sont juste moins visibles. Et après avoir atteint le fond, on se retrouve à l’endroit d’où on était parti pour découvrir une nouvelle couleur.
Jaune :
Acceptation. La grande révélation, une explosion de jaune, on accepte ce qui s’est passé. Quand soudain, tout s’effondre, le jaune à nouveau est noyé dans le bleu, l’acceptation ne se fait pas d’un coup, c’est un processus. Propulsé jusqu’au fond des abysses, on remonte petit bout par petit bout. Une descente de quelques secondes prend énormément de temps à remonter, et les pensées sombres continuent de nous hanter, symbolisées par une murène qui nous chasse. Là encore, d’autres émotions sont présentes. Notre colère nous permet de vaincre la murène, Puis on est guidé par de petites lanternes jaunes vers la sortie.
Une fois en haut, le monde n’a jamais été aussi coloré. L’acceptation n’est pas une grande émotion prenant toute la place, mais seulement de petites lanternes laissant la place aux autres. On réutilise tout ce que l’on a appris pour que tout enfin redevienne beau.
Le modèle de Kübler-Ross exploré par Gris est très critiqué, car il généralise à outrance un phénomène extrêmement spécifique. Chacun accepte ses pertes à sa manière et ++Gris++ nuance ce modèle en montrant qu’il n’est pas à prendre comme tel. Les étapes ne vont peut-être pas dans l’ordre, la transition de l’une à l’autre n’est peut-être pas claire et peut se passer dans les deux sens.